Port-au-Prince, le 3 octobre 2024.-
Le rapport publié par l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) le 2 octobre 2024 suscite de vives controverses en raison de ses contradictions factuelles et procédurales. Ce document, dévoilé dans une mise en scène spectaculaire par le Directeur Général de l’ULCC, sans consultation préalable des Conseillers Présidentiels de Transition (CPT), présente des lacunes juridiques notables, remettant en question sa validité légale.
Une saisine irrégulière via la presse
Au cœur de la polémique, le mode de saisine de l’ULCC soulève des questions majeures. Le rapport prétend que l’institution a été alertée par voie de presse au sujet des accusations portées par Raoul Pierre Louis contre trois Conseillers Présidentiels, qui lui auraient exigé 100 millions de gourdes pour sa reconduction à la Banque Nationale de Crédit (BNC). Cependant, l’article 19 du Décret du 8 septembre 2004 stipule clairement que les dénonciations doivent être formellement déposées auprès de l’ULCC, et non relayées par les médias. Cela constitue une violation flagrante du Code d’Instruction Criminelle. Si la presse suffisait à saisir l’ULCC, l’institution serait noyée sous des centaines de cas quotidiens. La procédure initiée est donc illégale et sans fondement.
L’usage contesté d’un faux procès-verbal
L’ULCC mentionne dans son rapport l’utilisation d’un procès-verbal de constat émis par le juge de paix Fritz Veus, concernant des échanges WhatsApp impliquant Raoul Pierre Louis. Toutefois, ce document n’a jamais été présenté par Pierre Louis lui-même, en raison de son caractère falsifié. Le recours à ce faux procès-verbal sans confrontation ni vérification en présence des parties concernées entache la crédibilité du rapport. En se basant sur ce document douteux, l’ULCC semble vouloir protéger Pierre Louis d’éventuelles poursuites en faux, tout en cherchant à discréditer les CPT.
Auditions manquantes et contradictions flagrantes
Un autre point soulevé par l’analyse concerne l’absence d’informations sur les auditions de plusieurs personnalités clés mentionnées dans le rapport, notamment Lonick Leandre et Onald Fontaine. Le manque de confrontations directes entre les parties compromet la transparence de l’enquête. De plus, le rapport attribue à tort l’organisation d’une réunion à la chambre 408 de l’Hôtel Oasis au CPT Louis Gérald Gilles, alors que cette dernière avait été réservée par Lonick Leandre, un ami de longue date de Raoul Pierre Louis. Ces incohérences suggèrent une volonté manifeste de manipuler les faits pour affaiblir les CPT.
L’accusation des 100 millions de gourdes sans preuve concrète
Le rapport se contente de reproduire les déclarations de Pierre Louis concernant une prétendue demande de 100 millions de gourdes pour sa reconduction à la BNC, sans fournir de preuves matérielles. Ces accusations reposent uniquement sur des témoignages non corroborés, consignés dans un faux procès-verbal. La simple parole de Pierre Louis ne peut être considérée comme une vérité absolue, d’autant plus qu’aucune preuve tangible n’a été fournie pour étayer ses affirmations.
Les cartes de crédit : un prétexte fragile
L’accusation selon laquelle les CPT auraient accepté des cartes de crédit en échange de la reconduction de Pierre Louis repose sur une incompréhension des mécanismes bancaires. L’émission de cartes de crédit est une procédure interne à la BNC, et les CPT ne peuvent être tenus responsables de l’octroi de ces cartes, surtout en l’absence de preuves d’une quelconque transaction illégale. De plus, les dépenses effectuées via ces cartes relèvent de décisions personnelles, et le simple fait de posséder une carte de crédit ne saurait être assimilé à un acte de corruption.
Le rapport de l’ULCC présente des incohérences légales qui compromettent sa validité. Des erreurs procédurales flagrantes, telles que la saisine par voie de presse, l’utilisation d’un faux procès-verbal et l’absence de preuves concrètes, remettent en question l’intégrité de l’enquête. En conséquence, il est essentiel que la justice examine de manière impartiale ces accusations avant de tirer des conclusions définitives, afin d’éviter toute manipulation visant à nuire aux CPT.