Washington, le 5 octobre 2024.-
Le programme humanitaire Parole, une mesure phare de l’administration Biden pour réguler l’immigration, touchera à sa fin en janvier 2025, une nouvelle qui plonge des centaines de milliers de Vénézuéliens, d’Haïtiens, de Cubains et de Nicaraguayens dans l’incertitude. Après deux ans d’existence, ce programme, qui a permis à près d’un demi-million de personnes de trouver une voie légale vers les États-Unis, ne sera pas renouvelé, selon des responsables du département de la Sécurité intérieure (DHS). Ceux qui ont bénéficié de ce dispositif devront quitter le pays, à moins qu’ils ne trouvent une solution permanente pour régulariser leur situation.
Une fin annoncée qui met en péril des milliers de vies
Le programme Parole a vu le jour en octobre 2022, initialement destiné aux migrants vénézuéliens fuyant une crise humanitaire dévastatrice. Il a ensuite été élargi en janvier 2023 pour inclure les Cubains, les Haïtiens et les Nicaraguayens. Ce modèle a été conçu d’après un programme similaire mis en place pour les Ukrainiens à la suite de l’invasion russe, offrant une issue légale à l’immigration clandestine, tout en imposant des conditions strictes : contrôles sanitaires, vérifications d’antécédents, et parrainage financier par des résidents américains.
Toutefois, cette porte d’entrée vers les États-Unis sera bientôt fermée. Les premières expirations de ces autorisations pour les Vénézuéliens se profilent ce mois-ci, tandis que celles des Cubains, Haïtiens et Nicaraguayens surviendront en janvier 2025. Ce qui les attend, c’est soit une expulsion, soit la quête d’autres solutions d’immigration légale, telles que le statut de protection temporaire (TPS), l’asile, ou encore, pour les Cubains, une carte verte via la loi d’ajustement cubain.
Un avenir incertain pour les plus vulnérables
Pour des milliers de migrants, les perspectives sont sombres. Ceux qui ne remplissent pas les critères du TPS, ou qui n’ont pas établi un dossier d’asile solide, se voient contraints de quitter les États-Unis, laissant derrière eux des mois d’efforts pour s’intégrer dans leur nouvelle vie. Le sort des Nicaraguayens semble particulièrement préoccupant : leur TPS n’a pas été réévalué depuis 1999, malgré la détérioration de la situation politique dans leur pays d’origine. Bien que des défenseurs des droits de l’homme en Floride appellent à l’élargissement de ce statut à ceux arrivés récemment, le gouvernement américain reste inflexible.
Selon Randy McGrorty, directeur exécutif des services juridiques catholiques, la nature même du programme Parole est de rester temporaire. Cependant, cette temporarité vient s’écraser contre la réalité d’un avenir incertain pour ces migrants, dont beaucoup fuient des régimes autoritaires et des conditions humanitaires critiques. Pour ceux qui ne trouvent pas de solutions légales, la perspective d’une expulsion rapide devient une menace imminente.
Le programme Parole : un succès terni par la politique
Le programme Parole a pourtant prouvé son efficacité, notamment en réduisant de plus de 99 % les entrées illégales de migrants des quatre pays concernés. Mais la politisation de l’immigration, en particulier à l’approche des élections présidentielles de 2024, a précipité sa fin. Les républicains, à la pointe de cette critique, dénoncent ce qu’ils qualifient d’abus de pouvoir exécutif. Une coalition de 12 États républicains a d’ailleurs tenté de bloquer le programme, mais leur plainte a été rejetée par un juge fédéral texan.
L’ancien président Donald Trump a d’ores et déjà annoncé qu’il mettrait fin aux protections des Haïtiens s’il revient au pouvoir. Cette menace pèse sur des milliers de vies qui dépendent de ces mesures temporaires. La fin du programme Parole reflète non seulement les divisions politiques internes aux États-Unis, mais aussi la volatilité de la politique d’immigration américaine.
Un retour en arrière dans la gestion des flux migratoires
Alors que l’administration Biden avait jusque-là vanté la réduction drastique des passages illégaux à la frontière américano-mexicaine, le retrait du programme Parole pourrait bien inverser cette tendance. Sans une alternative légale, il est à craindre que de nombreux migrants se voient contraints de retourner à des voies clandestines pour échapper à la violence et aux crises dans leur pays d’origine.
La fin de cette initiative humanitaire est perçue par beaucoup comme un échec moral et politique. Bien que des programmes similaires pour les Afghans et les Ukrainiens aient été renouvelés, les migrants issus des Amériques semblent moins prioritaires. Ce choix, à la croisée des pressions électorales et des défis humanitaires, laisse une marque indélébile sur l’approche de l’administration Biden vis-à-vis des crises migratoires mondiales.
Alors que la date butoir de janvier 2025 approche, il reste à savoir si une solution plus durable sera trouvée pour ceux qui, aujourd’hui, se voient à nouveau poussés vers l’inconnu.