Garry Conille en mode pigeon voyageur : un Premier ministre absent face à une nation en crise

Port-au-Prince, le 5 octobre 2024.-

Le Premier ministre Garry Conille a quitté Haïti ce samedi 5 octobre 2024, en direction des Émirats Arabes Unis et du Kenya, pour des discussions bilatérales sur la sécurité. Accompagné de la ministre des Affaires étrangères et des Cultes ainsi que de deux hauts gradés de la Police nationale d’Haïti (PNH), le chef du gouvernement a préféré quitter Port-au-Prince, plongeant le pays dans une nouvelle vague d’incertitude.

Ce voyage a pour but officiel de renforcer les capacités de la PNH à travers des accords de coopération avec les Émirats Arabes Unis, portant sur l’acquisition d’équipements et l’assistance technique nécessaire à la gestion sécuritaire. Conille se rendra ensuite au Kenya pour rencontrer le président William Ruto, dans l’optique de discuter du déploiement supplémentaire de 600 policiers kényans dans le cadre de la Mission multinationale de soutien à la sécurité en Haïti.

Bien que ces initiatives visent à répondre à la crise sécuritaire, l’absence de communication préalable aux citoyens et le silence entourant les détails de ces déplacements soulèvent des questions. Comment, dans un contexte de tensions croissantes entre le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) et la Primature, le Premier ministre peut-il continuer à effectuer ces voyages internationaux sans prendre le temps d’informer ni de rassurer une population prise au piège entre insécurité grandissante et stagnation politique?

Le départ de Garry Conille s’inscrit dans un contexte d’instabilité où les gangs contrôlent une grande partie du territoire, rendant la vie quotidienne des Haïtiens invivable. Le timing de ces voyages fait sourciller alors que le pays traverse l’une des pires crises de son histoire récente. Les affrontements entre la Primature et le CPT, le manque de coordination au sommet de l’État, et les nombreuses promesses de réformes non tenues placent le Premier ministre dans une posture de dirigeant déconnecté des réalités nationales.

De plus, la nature de ses voyages, bien que cruciale pour l’avenir sécuritaire du pays, semble accentuer son éloignement face aux enjeux immédiats de la population. Le peuple haïtien attend des actions concrètes et des décisions locales pour contrer la violence armée qui sévit dans les quartiers populaires, pourtant, il voit ses dirigeants partir vers l’étranger à répétition.

Le mode de gestion du Premier ministre soulève également des critiques sur sa stratégie à long terme. Il apparaît que Conille, confronté à des blocages internes avec le CPT, préfère chercher des solutions extérieures, parfois perçues comme éloignées des besoins urgents du terrain. Renforcer la PNH est certes une priorité, mais cette institution manque avant tout de leadership et de coordination, des faiblesses qu’aucun voyage ou accord à l’international ne peut résoudre sans réformes structurelles.

Le manque de transparence autour de ce départ soulève encore plus d’interrogations : pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas jugé nécessaire de communiquer sur ces déplacements? Ce silence crée un vide dans un pays déjà affaibli, et renforce le sentiment que les dirigeants sont plus préoccupés par des alliances étrangères que par le bien-être immédiat de leurs citoyens.

En choisissant de partir sans fournir d’explications ou de mesures temporaires, Garry Conille et son équipe envoient un message clair : l’État haïtien, déjà paralysé, n’est pas en mesure de répondre efficacement aux crises urgentes. Ce n’est pas la première fois que le Premier ministre se retrouve sous le feu des critiques pour son absence sur le territoire national lors de moments critiques.

Au-delà de l’importance stratégique de ses voyages, il est impensable de négliger la communication avec le peuple haïtien. Ce silence assourdissant, associé à une instabilité croissante, ne fait que creuser le fossé entre le gouvernement et une population désabusée.

Garry Conille, en mode pigeon voyageur, doit se rappeler que la gestion d’un État en crise exige plus que des alliances internationales. Elle nécessite une présence sur le terrain, un dialogue constant et une action déterminée pour faire face aux réalités immédiates. Les Haïtiens, pris au piège de la violence quotidienne, ne peuvent plus se permettre un dirigeant absent.

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