Chaises musicales au sommet : Laurent Saint-Cyr, nouveau capitaine d’un navire en pleine tempête

Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) change (encore) de tête. Ce jeudi 7 août 2025, Laurent Saint-Cyr a officiellement reçu les clés – et les tracas – de la transition haïtienne, succédant à Fritz Alphonse Jean lors d’une cérémonie protocolairement solennelle mais politiquement électrique.

Port-au-Prince, 7 août 2025 –

La Villa d’Accueil n’a jamais aussi bien porté son nom. Ce jeudi 7 août 2025, elle a accueilli un nouvel occupant de plus : Laurent Saint-Cyr, fraîchement couronné Président du Conseil Présidentiel de Transition (CPT). Après Edgard Leblanc Fils, Leslie Voltaire et Fritz Alphonse Jean, c’est donc à son tour de monter sur le trône, en plastique, sans coussin, d’une transition qui n’en finit pas.

C’est dans une ambiance digne des grands jours (ou des grands jeux ?) que le Conseiller-Président sortant, Fritz Alphonse Jean, lui a passé le flambeau. Flambeau symbolique, certes, mais manifestement bien lourd à porter. Le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, les membres de son gouvernement, des juges de la Cour de cassation, des diplomates, et quelques visages sérieux de la société civile ont assisté à la cérémonie, mi-officielle, mi-suspense politique.

Dans son discours d’acceptation, Saint-Cyr a joué la carte du patriote modeste : « J’accepte cette lourde responsabilité avec beaucoup d’humilité et un profond sens patriotique », a-t-il lancé, avant de tendre la main à toutes les forces vives du pays pour un dialogue.

Le nouveau Président du CPT promet l’unité, la sécurité, une réforme constitutionnelle, la relance de l’économie, et, cerise sur le gâteau (ou mirage sur le désert), la tenue d’élections. Bref, tout ce que le peuple attend depuis… disons, plusieurs décennies.

Mais le moment le plus applaudiméditatif fut sans doute cette phrase : « Ce n’est plus le moment des beaux discours, mais celui de l’action. Trop de sang a coulé, trop de temps a été perdu. »

Certains murmuraient : enfin une lucidité présidentielle, d’autres se demandaient si ce n’était pas un beau discours de plus.

Du côté du Président sortant, Fritz Alphonse Jean n’a pas mâché ses regrets. Non seulement il a dressé un bilan aussi léger qu’un flyer électoral, mais il a aussi tenté un clash final, en rappelant (sans le dire trop fort) qu’il avait tout fait pour empêcher Saint-Cyr de prendre les rênes. Motif ? Les deux branches de l’exécutif aux mains du secteur privé, ça fait désordre dans un pays où l’État est déjà sous perfusion.

Selon plusieurs sources (et quelques langues bien pendues), Fritz aurait même tenté de manigancer une destitution du Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé. Tentative avortée. Résultat : un passage de pouvoir un peu amer, mais bien emballé.

Et voilà donc Saint-Cyr intronisé quatrième président d’un CPT en mode marathon. Reste à voir s’il arrivera à la ligne d’arrivée, ou s’il rejoindra rapidement le club des ex-présidents de transition, aussi nombreux que les jours fériés en Haïti.

Avec une nation en crise, des attentes monumentales et une instabilité politique devenue presque folklorique, Laurent Saint-Cyr entame son mandat comme on entre dans une pièce pleine de mines : prudemment, mais avec espoir. Quant au peuple ? Il attend toujours – entre deux coupures de courant – que l’un de ces présidents tienne enfin ses promesses.

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